La rupture du contrat de travail pour cause d’accident du travail ou maladie professionnelle
La rupture du contrat de travail pour cause d’accident du travail ou maladie professionnelle. En matière de suspension du contrat de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle, de nombreuses règles sont identiques à celles applicables pour la maladie non professionnelle. Cependant, le législateur a entendu renforcer certaines dispositions en cas d’accident du travail et de maladie professionnelle.
Conformément à la théorie du risque, l’accident étant dû à l’entreprise, la loi interdit à l’employeur d’user de son pouvoir de résiliation unilatérale pendant la période de suspension du contrat.
Ainsi, au regard de l’article L. 1226-9 du Code du travail, seules les voies du licenciement pour faute grave ou pour impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie sont ouvertes à l’employeur dans ce cas de figure.
1. La faute grave
La faute grave justifiant le licenciement du salarié pour cause personnelle peut résider :
– dans un comportement antérieur à l’accident, elle peut ainsi découler du comportement qui a provoqué l’accident ;
– d’un manquement aux obligations du contrat de travail qui persistent pendant sa suspension.
Par exemple, le maintien de l’obligation de loyauté pendant la suspension du contrat interdit au salarié d’exercer une activité concurrentielle au détriment de son employeur.
Ou encore, a été considéré comme faute grave justifiant la rupture, le fait pour un salarié exerçant des fonctions de responsabilité de ne pas répondre aux lettres de l’employeur l’interrogeant sur son état de santé alors que son absence perturbait gravement la marche de l’entreprise (Cass. Soc. 7 juin 1989, n° 86-43.159).
Un fait commis par un accidenté du travail au cours de la période de suspension du contrat du travail, qui ne prend fin qu’avec la visite de reprise du médecin du travail, ne peut justifier un licenciement disciplinaire que si ce fait constitue une faute grave, même si le licenciement est prononcé à l’issue de la période de suspension (Cass. Soc. 12 mars 2002, n° 99-42.934).
En revanche, ne constitue pas une faute grave de nature à justifier le licenciement d’un salarié accidenté du travail la seule absence d’une justification de prolongation de l’arrêt de travail, même à la demande de l’employeur, dès lors que celui-ci est déjà informé par le certificat médical initial et les certificats ultérieurs de prolongation (Cass. soc., 24 oct. 1996, n° 93-44.792 ; Cass. soc., 17 oct. 2000, n° 98-41.582).
2. L’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif indépendant de l’état de santé
La jurisprudence se montre très réticente à admettre cette possibilité pour l’employeur de se dégager de ses obligations.
L’impossibilité de maintenir le contrat de travail qui légitime le licenciement doit s’entendre, comme en matière de maternité, de circonstances indépendantes du comportement du salarié, tenant à la vie de l’entreprise, qui imposent la suppression de l’emploi (Cass. Soc. 20 juin 1990, n° 85-43.708).
Cette impossibilité doit être prouvée même lorsque le licenciement intervient pendant la période d’essai (Cass. Soc. 12 mai 2004, n° 02-44.325).
a. Cas de licenciements injustifiés
A été considéré comme nul le licenciement du salarié en arrêt de travail consécutif à une rechute d’accident du travail pour motif de « perturbation et désorganisation de l’entreprise engendrées par vos très nombreuses absences avec impossibilité de pourvoir à votre remplacement », dans la mesure où il s’agit d’un motif lié à l’accident du travail (Cass. Soc. 23 mars 2004, n° 01-46.007).
Par ailleurs, l’existence d’un motif économique de licenciement ne caractérise pas nécessairement, en soi, l’impossibilité de maintenir, pour un motif non lié à l’accident ou à la maladie, le contrat de travail d’un salarié suspendu par l’arrêt de travail provoqué par un accident du travail ou une maladie professionnelle (Cass. Soc. 7 juillet 2009, n° 08-40.885 ; Cass. soc., 18 février 2015, n° 13-21.820 ).
Par conséquent, la seule mention, dans la lettre de licenciement, de la suppression du poste, ne suffit pas à caractériser l’impossibilité du maintien du contrat de travail (Cass. Soc. 7 décembre 1999, n° 97-44.472).
Il en est de même du seul énoncé, dans la lettre de rupture, des raisons économiques motivant le licenciement, sans qu’il soit précisé en quoi celles-ci plaçaient l’employeur dans l’impossibilité de maintenir le contrat de travail (Cass. Soc. 15 novembre 2000, n° 98-46.404).
Ainsi, la cessation d’activité, ou tout autre motif économique, ne libère pas l’employeur de son obligation de respecter les règles particulières aux salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle (Cass. Soc. 7 mars 2007, n° 05-43.872).
b. Cas de licenciements jusitfiés
Un motif économique peut justifier le licenciement s’il est établi qu’il constitue une impossibilité de maintenir le contrat de travail (Cass. soc., 15 mars 2005, n° 03-43.038).
Le licenciement d’un salarié en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail peut donc avoir pour cause l’achèvement des tâches pour la réalisation desquelles il a été engagé.
En effet, la rupture du contrat est justifiée, en application de l’article L. 1226-9 du Code du travail, par l’impossibilité dans laquelle se trouve l’employeur de maintenir le contrat de travail pour un motif non lié à l’accident du travail (Cass. Soc. 8 avril 2009, n° 07-42.942).
Encore faut-il que l’ordre des licenciements soit respecté et que le choix du salarié parmi les personnes licenciées ne soit pas motivé par une réduction de ses capacités physiques consécutive à l’accident du travail (Cass. Soc. 25 mai 1993, n° 91-43.515).
L’impossibilité peut aussi résulter de la cessation totale d’activité de l’employeur.
c. Appréciation de l’impossibilité de maintenir le contrat de travail
L’impossibilité de maintenir le contrat de travail s’apprécie à la date de la rupture (Cass. Soc. 25 mai 1993, n°90-44.451).
En effet, l’article L. 1226-9 du Code du travail ne reprend pas la restriction de l’article L. 1225-4 du Code du travail qui dispose que, lorsque la résiliation du contrat de la femme enceinte est possible, celle-ci ne peut prendre effet pendant la période de suspension du contrat de travail.
3. Les effets du licenciement injustifié
En cas de méconnaissance de ces règles, le licenciement est nul.
Le salarié peut alors demander sa réintégration dans l’entreprise et le paiement d’une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s’est écoulée entre la rupture et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont il a été privé.
Le salarié qui ne demande pas sa réintégration, a droit, outre les indemnités de rupture (indemnités de licenciement ou compensatrice de préavis), à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois.
4. La rupture conventionnelle est-elle possible ?
Lorsque le contrat de travail est suspendu, la nature de la suspension peut interdire le recours à la rupture conventionnelle.
Tel est le cas lorsqu’au titre de son arrêt de travail le salarié bénéficie d’une protection contre le licenciement pour cause d’accident du travail, de maladie professionnelle ou de maternité.
En effet, la circulaire n° 2009-04 du 17 mars 2009 dispose en son article 1.2 que « dans les cas où la rupture du contrat de travail est rigoureusement encadrée durant certaines périodes de suspension du contrat (…) la rupture conventionnelle ne peut être signée pendant cette période ».
Il a ainsi été jugé qu’était nulle une rupture d’un commun accord conclue au cours de l’arrêt de travail d’un salarié consécutif à un accident du travail et produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 4 janvier 2000, n° 97-44.566).
Toutefois, la Cour de cassation a récemment jugé que la signature d’une rupture conventionnelle avec un salarié déclaré apte avec réserves à la suite d’un accident du travail était possible, sauf à ce que l’intéressé rapporte la preuve de l’intention frauduleuse de l’employeur (Cass. Soc., 28 mai 2014, n°12-28.082).
Aussi et surtout, la Cour de cassation a encore plus récemment autorisé qu’une rupture conventionnelle puisse être conclue au cours de la suspension du contrat de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle (Cass. Soc. 30 septembre 2014, n° 13-16.297), sauf fraude de l’employeur ou vice de consentement du salarié.
Cette décision représente un total revirement de jurisprudence allant à l’encontre de la Circulaire de 2009 rendant désormais possible la conclusion d’une rupture conventionnelle en cas de suspension du contrat de travail en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle sauf en cas de fraude ou de vice du consentement.
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